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Catéchèse paroissiale faite le dimanche 11 décembre 2011
Le diaconat est un degré dans la hiérarchie sacrée : il est un ordre majeur, mais non sacerdotal. Il est aussi la source et le modèle de tout le clergé mineur. Son importance historique est surtout liée au fait qu’il soit d’origine apostolique.
- Les fondements bibliques et apostoliques du diaconat
– Le diaconat est clairement apostolique : sa fondation est rapportée dans la Bible, dans les Actes des Apôtres, au chapitre 6 (1-6)
La première communauté chrétienne s’efforçait de mettre en pratique à la lettre l’enseignement du Seigneur : les premiers chrétiens mettaient tout en commun et vivaient réellement en communauté, dans une attente eschatologique du Retour en gloire du Seigneur (qu’ils espéraient proche). Il fallait donc que certaines personnes s’occupent de répartir les vivres (blé, huile, vin…) et beaucoup de biblistes estiment que ce service existait déjà, avant la création des diacres. Mais il y eût une contestation, parce que les « veuves des Hellénistes étaient négligées », c’est-à-dire défavorisées (par rapport aux veuves des Hébreux). Cela demande un mot d’explication :
. veuves : elles posaient un problème crucial dans l’Antiquité, parce qu’en tant que femmes seules, c’est-à-dire sans la tutelle d’un homme, elles n’avaient aucun statut social, la femme ne se définissant que par rapport à l’homme. C’est l’honneur des chrétiens que de s’être préoccupés des veuves.
. Hellénistes : c’étaient des juifs de la diaspora revenus en Israël, mais de culture et de langue grecques. Ils avaient souvent gardés des usages non juifs, grecs ou romains.
Le problème est tel qu’il remonte jusqu’aux Apôtres, qui y réfléchissent, prient et prennent une décision. Estimant qu’ils ne pouvaient pas délaisser le « ministère de la Parole » pour s’occuper de l’intendance, ils demandent au peuple [royal] de choisir parmi eux 7 hommes pieux, dignes de confiance, « pleins d’Esprit Saint et de Sagesse ». 7 sont élus (dont un d’origine païenne : « Nicolas, prosélyte d’Antioche ») : les Apôtres prient et leur imposent les mains (c’est la transmission de la grâce) pour leurs confier la charge de répartir les vivres.
C’est la première fois que nous voyons, dans le Nouveau Testament, ce qui deviendra le modèle de tous les recrutements ecclésiastiques (et en particulier de l’épiscopat) : l’élection par le peuple puis la transmission de la grâce, signifiant l’union libre des 2 volontés, humaine et divine, la synergie. En outre, cet évènement est riche d’enseignement sur l’esprit des Apôtres et de l’Eglise originelle :
. les Apôtres ne veulent pas tout faire : ils se consacrent délibérément à l’essentiel, au cœur de leurs fonctions (la liturgie [la prière] et la mission [la Parole]) et confient le reste à d’autres. Ils ne font pas tout : ils délèguent.
. En corollaire, cela signifie que chacun a sa place, un rôle, une fonction.
Tout cela est à l’image du Christ, qui ne fait pas tout par Lui-même, mais qui fait coopérer l’Homme à son salut. C’est l’embryon de la hiérarchie sacrée, qui est une dynamique spirituelle, un mouvement continu d’élévation.
– Au départ, la fonction des diacres est donc économique et logistique : c’est le « service des tables ». Le terme même de « diacre » n’apparaît pas dans les Actes, mais il se trouve chez St Paul (une fois dans l’épître aux Philippiens et trois fois dans la première épître à Timothée((1-Ph.1/1 ; 1Tm3/8-13.))). Le terme grec « diakonos » veut dire « serviteur », « qui est au service de ». « Diakonia » a été traduit en latin par « ministerium ». Cette fonction de service subsistera durant tout le premier millénaire.
Mais nous voyons par ailleurs que, à côté de cette fonction pratique, certains diacres accomplissent aussi des œuvres spirituelles :
. Etienne (le « premier » diacre) qui fait un admirable témoignage devant le Sanhédrin (ce sera la cause de son martyre).
. le diacre Philippe, qui a une activité missionnaire importante (Ac 8/6-40) et qui est appelé « Philippe l’Evangéliste, l’un des sept » (Ac 21/8).
Ils accomplissent une fonction de service, mais cela n’exclut pas la mission, ni le rôle spirituel, qui incombent à tous les chrétiens.
– Les diacres vont passer très vite des tables profanes à la table sacrée, l’autel, du repas profane au repas sacré, l’Eucharistie.
. D’une part la première communauté chrétienne (judéo-chrétienne) ne durera pas longtemps en raison des persécutions et de la guerre juive (prise de Jérusalem par Titus en 70, avec la destruction du Temple) : elle se replie sur Pella (en Décapole). Mais d’autre part et surtout, il était dans la nature même du Christianisme que d’être missionnaire (« Allez, enseignez toutes les nations… »). Le Christianisme se répand dans tout l’Orient et en Occident (à Rome notamment).
. Or nous constatons, à travers le témoignage des Pères « apostoliques » (St Clément de Rome, St Ignace d’Antioche, St Polycarpe de Smyrne,… (1e-2e s.)), puis des Apologistes (St Justin le Philosophe) et des premiers Pères de l’Eglise (St Clément d’Alexandrie, St Hippolyte de Rome,…(2e-3es.)) que le diaconat trouve sa place : ils en parlent souvent et sont les premiers à parler d’une hiérarchie ecclésiastique qui comporte 3 degrés (l’évêque, le presbyterium((Presbyterium : de prebyteros = ancien, prêtre .Le presbyterium est le collège des prêtres qui entoure l’évêque. L’évêque était vraiment au centre de l’Eglise et il y en avait beaucoup, un dans chaque ville, même petite. Mais il n’était pas seul : il était entouré de nombreux prêtres qui l’assistaient et l’aidaient. Les Pères mentionnés ci-dessus comparent souvent l’évêque et son presbyterium, au Christ entouré du collège des Apôtres.)), les diacres), établissant un parallèle avec l’Ancien Testament (Grand Prêtre, prêtres, lévites) et avec la hiérarchie céleste (qui est basée sur le nombre 3 : il y a 3 fois 3 hiérarchies, ce qui fait 9). Avant le milieu du 2e siècle, il y a des diacres dans toutes les communautés chrétiennes.
. Puis, dans tous les grands documents qui expriment et constituent la tradition liturgique et canonique de l’Eglise (la Didachê, la Tradition apostolique de St Hippolyte, les Constitutions apostoliques [C.A.], le Testament du Seigneur,…)((La Didachê, qui est le « prototype de tous les règlements ecclésiastiques », est du 2ème s. La Tradition apostolique de St Hippolyte de Rome, qui indique les premières formules liturgiques complètes, date du début du 3ème s. Les Constitutions apostoliques [C.A], qui sont le plus important des monuments liturgico-canoniques de l’Eglise antique, sont une compilation syrienne de la fin du 4ème siècle ; son livre VIII s’inspire fortement de la Tradition apostolique d’Hippolyte. Le Testament de Notre Seigneur est une amplification de la Tradition apostolique, datant du 5ème siècle.)), on voit que, petit à petit, les fonctions diaconales sont précisées (comme tout le reste d’ailleurs).
- Les fonctions diaconales dans l’Eglise antique (fin 3e s. – début du 4e s.).
D’abord, au plan général, les diacres sont intimement liés à l’évêque : ils sont là « pour le décharger d’une multitude d’affaires, pour que ce dernier puisse s’occuper des plus importantes » (C.A. II.44,3).
Les diacres assistent l’évêque et le presbyterium : « ils servent, mais n’accomplissent pas les autres fonctions » (c’est à dire sacerdotales). Ils ne peuvent ni bénir [les fidèles], ni offrir le sacrifice [eucharistique]. Les textes précisent bien qu’ils ne doivent rien faire sans la bénédiction de l’Evêque ou du prêtre. Ils ne sont pas autonomes : ils doivent se tenir dans l’obéissance comme de bons serviteurs.
Ils sont nombreux (de même que le clergé mineur). Une distinction va s’opérer rapidement entre « les diacres » et le diacre personnel de l’Evêque, qui deviendra l’archidiacre, un personnage important.
Les différentes fonctions des diacres :
a- L’aspect caritatif demeure : ils s’occupent des voyageurs, de l’assistance (pauvres, infirmes,…), visitent les malades, signalent les malheureux à l’évêque.
b– Mais ils ont surtout un rôle liturgique : ils sont une sorte de « majordome » de la liturgie.
- Ils reçoivent les offrandes pour la liturgie (en inscrivant les noms des donateurs et « de ceux pour qui ils les ont offerts » sur les diptyques) et les préparent (dans les pastophoria((Les pastophoria étaient des sortes d’absidioles, de part et d’autre du sanctuaire, où l’on préparait les Dons, où l’on conservait les vases sacrés et les objets cultuels et où l’on gardait le trésor (les finances de l’Eglise). Le terme de « diaconicon » est ancien, celui de « prothèse » plus récent.)), dont l’un finira par s’appeler le diaconicon).
- Ils placent les fidèles et les surveillent, assistés des clercs mineurs, dont les sous-diacres (ils veillent au maintien de l’ordre).
- Ils donnent le signal du début et de la fin de la Liturgie.
- Ils font les monitions (= commandements).
- Ils conduisent la prière du peuple (les litanies).
- Ils font les lectures (Evangile et épître), mais en partage avec les prêtres et les lecteurs.
- Ils lisent les diptyques publics (saints, hiérarchie sacrée, vivants, défunts).
- Ils congédient les gens en fonction de leurs catégories (catéchumènes, énergumènes, pénitents).
- Ils interviennent dans le chant (un peu comme des superviseurs).
- Ils participent à la distribution de l’Eucharistie (l’évêque donne le précieux corps et le diacre tend le calice pour le précieux sang).
- Ils ramènent les restes des Dons dans le pastophorion [et probablement les consomment, après en avoir prélevé pour les gens empêchés].
c– Ils portent la communion aux fidèles empêchés ( malades, infirmes, femmes enceintes …, mais aussi à ceux qui ne pouvaient pas venir à cause des persécutions), car la communion eucharistique était considérée comme une nécessité vitale.
d– Ils veillent à la préparation des catéchumènes (notamment ils leur font répéter le Credo et le Notre Père…)
En ce qui concerne le rôle liturgique des diacres, il y a une grande différence entre les diacres romains et tous les autres diacres. En effet dans les liturgies orientales (et notamment les 3 grandes : la byzantine [Constantinople], Saint-Jacques [Syrie] et Saint-Marc [Egypte] comme dans toutes les liturgies de la famille gallo-romaine [Gaules, Espagne, Italie du Nord….] le rôle des diacres est très important, parce qu’elles comportent toutes de nombreuses litanies, de vrais diptyques et de nombreuses monitions. Tandis que dans la liturgie romaine, il n’y a pas de litanies, peu de monitions et des diptyques dilués au sein du Canon. Par contre les diacres romains eurent très tôt un rôle administratif important.
En fait, les diacres sont à la charnière des deux ordres, majeurs et mineurs :
– ils appartiennent au clergé majeur, parce ils reçoivent une véritable ordination (impostion des mains), sont proches de l’autel et touchent les vases sacrés et les saints Dons. Mais on peut célébrer sans eux : leur présence n’est pas indispensable.
– ils sont proches du clergé mineur, sur lequel ils ont la haute main, parce qu’ils ont, en partie, des fonctions similaires (surveillance, maintien de l’ordre). Le clergé mineur s’est développé comme une démultiplication des fonctions diaconales, un prolongement du diaconat : dans les textes, on décrit les diacres comme faisant aussi fonction de portiers, lecteurs, chantres. Les ordres mineurs sont à peu près constitués vers le milieu du 3ème siècle, dans l’ordre traditionnel (portier, lecteur, exorciste, acolyte, sous-diacre). Le terme même de « sous-diacre » est d’ailleurs significatif.
III- L’évolution historique du diaconat.
Il y a eu une évolution différente en Orient et en Occident.
Le double aspect de la fonction diaconale (économique et liturgique) constituait une richesse (parce que c’était relier le sacrement du frère à celui de l’autel) et un danger (parce que cela leur donnait du pouvoir). Les diacres ont eu rapidement la haute main sur l’administration et ils étaient souvent gardiens du trésor, c’est-à-dire des finances de l’Eglise.
Ils avaient aussi le rôle de secrétaires particuliers des évêques et les représentaient souvent dans les conciles, lorsque ces derniers étaient empêchés. Lorsqu’un évêque décédait, son diacre administrait le diocèse pendant la vacance, mais s’il s’agissait d’un archevêché, cela signifiait qu’il donnait des ordres aux évêques « suffragants »((Suffragants : il s’agit des évêques de la province ecclésiastique, à la tête de laquelle se trouve un archevêque métropolitain, qui préside le concile de la province.))! A Rome, l’archidiacre était le numéro deux et souvent il succédait au pape défunt.
Il y a eu aussi parfois des frictions avec les prêtres, des conflits de compétence, certains prêtres voyant d’un mauvais œil le poids et l’importance des diacres.
Les conciles se sont faits l’écho de tous ces « dérapages » et ils légifèrent souvent sur les diacres pour les remettre à leur place, d’une façon qui en dit long sur certains excès (ne pas prendre la place des prêtres, ne pas s’assoir en leur présence, ne pas communier avant eux,…)
Tout cela a nui au diaconat, comme le souligne justement Mgr Stéphane dans son livre sur « Ministères et charismes dans l’Eglise orthodoxe »((Ministères et charismes dans l’Eglise orthodoxe, Paris, Desclée de Brouwer, 1988.Chap.3 : le service des tables.)).
Il va donc y avoir une double évolution durant le 2e millénaire :
– En Occident, cela a conduit à une quasi disparition du diaconat (on était diacre une journée !). Ce n’était plus que le passage obligé pour la prêtrise.
– En Orient, il a subsisté en tant que tel, mais il a été cantonné dans des fonctions purement liturgiques, et même amoindries. En raison d’une sacerdotalisation de l’Eglise (qui est universelle et tout à fait contraire à l’esprit de l’Eglise apostolique : tout va être accaparé par le sacerdoce, c’est-à-dire les évêques et les prêtres, qui finiront par tout faire), le rôle des diacres, même liturgique, sera largement diminué et amputé. Quelques exemples :
. traditionnellement, les diacres portaient la Communion aux malades. Avec l’habitude d’imposer aux fidèles la confession avant la Communion, cette fonction a disparu.
. traditionnellement, les diacres recevaient les offrandes des fidèles et les préparaient (c’est la « prothèse », qui va se développer énormément dans le rite byzantin à partir du 8e siècle). Jusqu’au 15e siècle cette prothèse était faite par les diacres. Or elle est devenue sacerdotale, et même, en partie, épiscopale, ce qui est absurde puisque c’est un rite préparatoire.
. beaucoup de sacrements non eucharistiques, ainsi que les offices divins (les heures), pourraient être célébrés ou présidés par des diacres en cas d’empêchement du prêtre (onctions, bénédictions de maison et même baptême [les C.A. l’admettent à titre exceptionnel] ; tous les offices divins), mais avec la bénédiction expresse de ce dernier et en les aménageant (pas de bénédiction des personnes ni du peuple). Même une liturgie des Présanctifiés pourrait être présidée par un diacre, puisqu’il n’y a pas de consécration ! Dans le cas de l’Office divin, cela pose encore moins de problèmes (et pourtant, j’ai vu un jour célébrer des vêpres dans une paroisse russe de province, où il n’y avait pas de prêtre résidant, mais un diacre : ce dernier n’a même pas osé monter à l’autel, ni encenser ; en fait, c’était le chef de chœur qui présidait ! la fonction diaconale était niée.)
– Il faut mentionner deux éléments de renouveau au 20e siècle :
. le premier concerne l’Eglise orthodoxe : après la seconde guerre mondiale, le diaconat a été restauré, dans le cadre de l’Orthodoxie occidentale, par l’Evêque Jean, et dans sa plénitude. J’en suis témoin. Il faut dire que, dans le rite des Gaules, la place du diacre est évidente. L’Evêque Jean avait même élaboré une « synaxe diaconale » pour les lieux où il n’y avait pas de prêtre : c’était une sorte de liturgie des Présanctifiés, mais en dehors du Carême. Je l’ai célébrée deux fois. C’était une innovation audacieuse, mais intéressante.
. le second concerne l’Eglise catholique-romaine : après Vatican II (1965), elle a restauré le diaconat permanent, en y appelant des hommes mariés, revenant ainsi à deux traditions antiques. Mais il faut bien dire que les diacres, dans la liturgie romaine de Paul VI, ont peu de rôle (c’était déjà le cas dans l’ancienne messe romaine).
IV- Le diaconat actuel : aspect théologique et fonctions.
Tous les grands commentateurs syriens et byzantins de la liturgie sont d’accord : le diaconat représente le monde angélique dans la liturgie. La fonction diaconale est angélique (tandis que la fonction sacerdotale est christique, divine). De même que les anges sont les messagers de Dieu pour nous, de même le diacre fait la navette entre le sanctuaire, qui représente le Ciel((L’autel, qui se trouve au centre du sanctuaire, représente le trône de Dieu.)), et la nef, qui représente la terre, là où sont les fidèles.
D’où le fait que le diacre doive être simultanément bien visible, mais transparent, comme les anges. Lorsqu’il se tient à l’autel, il doit être en arrière du prêtre, proche du chancel((le chancel est la barrière qui ferme le sanctuaire, avec ses trois portes : la porte royale, porte du Ciel, et les portes latérales, qui sont des portes de service, notamment pour les acolythes. Il est l’équivalent de l’iconostase orientale, mais jusqu’au 15ème siècle, celle-ci ne dépassait pas un mètre de haut.)), et sur le côté (droit, ou gauche s’il y a deux diacres) pour ne pas cacher l’autel. Il entre et sort par les portes royales (porte du Royaume) comme le prêtre((Dans l’usage actuel de l’Orient, les diacres passent beaucoup par les portes latérales, et un peu par les portes royales. Pourtant les anges sont gardiens de la porte du Paradis…)).
Ses vêtements :
– le sticharion, qui est en fait une tunique longue (en Occident : une dalmatique, plus courte) à manches amples (tout à fait différent du sticharion du prêtre, qui s’apparente plutôt à l’aube occidentale)
– l’étole, appelée en Orient « orarion » (tandis que celle du prêtre est appelée « épitrachyle »)((Il est intéressant de noter qu’en Orient il y a 2 termes différents pour l’étole, car celle des prêtres et celle des diacres n’ont pas la même signification : l’orarion diaconal sert à montrer des personnes, des lieux ou des actions ; l’épitrachyle des prêtres et des évêques est le signe de la grâce sacerdotale, représentant les deux économies, celle du Fils et celle de l’Esprit, provenant toutes les deux de la source paternelle.)) qui est portée sur l’épaule gauche, parce que c’était l’attribut des serviteurs (selon Théodore de Mopsueste). Les commentateurs byzantins y voient le symbole des ailes des anges. Chez les Slaves, on y inscrit trois fois « Sviat » (Saint) pour rappeler la liturgie céleste. Le diacre la tient toujours de la main droite avec 3 doigts, même lorsqu’il n’agit pas, pour montrer qu’il est toujours prêt à servir. Dans l’usage slave, que nous suivons, le diacre porte l’étole sur l’épaule gauche, simplement. Seuls les archidiacres l’enroulent autour de leur poitrine (comme une cuirasse). Mais dans l’usage grec, tous les diacres portent l’étole comme les archidiacres.
– les surmanches, qui sont, comme celles des prêtres, un vêtement à caractère pratique (destinées à éviter que les saintes parcelles ne tombent dans les manches, puis par terre)
En principe il doit porter les mêmes couleurs que le prêtre (en fonction du temps liturgique). Il doit venir se faire bénir avant de s’habiller et dire les prières afférentes.
Son rôle dans la liturgie. Il est précis.
- Il montre [au peuple] tout ce qui se passe, par le geste et la parole
. par le geste : il montre avec son étole à qui il s’adresse ou le lieu où il se passe quelque chose.
. par la parole : il indique au peuple ce que le prêtre est en train de faire (consécration, fraction du pain… [pour ceux qui sont loin et ne voient pas].
- Il fait les monitions au peuple (« Debout, soyons attentifs, soyons en silence, avancez-vous, retirez-vous, inclinez-la tête… »). Il commande et donc se tourne vers le peuple.
- Il conduit la prière du peuple: les litanies. Il se met au milieu du peuple, montrant le sanctuaire avec son étole (parce qu’on s’adresse à Dieu) et dit pour qui ou pour quoi il faut prier, en terminant chaque clausule par « prions le Seigneur » ou « demandons au Seigneur ». Tout le peuple répond : « Kyrie eleison » ou « accorde Seigneur ».
- Il fait les encensements, qui sont toujours réservés au clergé majeur (un clerc mineur ne doit jamais encenser). Sur les fresques, on voit souvent les anges, habillés en diacre, encenser.
- Il proclame l’Evangile, face au peuple((L’usage actuel dans l’Eglise d’Orient de faire lire l’Evangile par les diacres tournés vers l’autel (de même que les Epîtres par les lecteurs, d’ailleurs) est une aberration liturgique et pédagogique, car l’Ecriture ne vient pas du peuple pour aller vers Dieu, mais elle vient de Dieu (le sanctuaire) pour aller vers le peuple. Cet usage est contredit par toute l’iconographie et l’archéologie chrétiennes.)), mais pas au centre (dans la tradition orientale, c’est réservé aux prêtres et aux évêques), sur la droite par rapport au sanctuaire (dans les églises antiques, il y a à cet endroit la « chaire de l’Evangile », sur un ambon ; on lisait l’Epître et l’Ancien Testament sur le côté gauche, sur un pupitre plus modeste, mais toujours sur un ambon, sorte d’estrade permettant à tous de voir et d’entendre).
- Il participe à la distribution de la Communion
. il peut faire la fraction du pain (c’est courant dans les Eglises de tradition grecque).
. il tient le calice lorsque la Communion est donnée par intinction.
. parfois, chez les Grecs, il donne la Communion.
- Il consomme les Dons restants et « purifie » les vases sacrés (après la liturgie).
- Il participe à la prothèse (mais modestement) et à la grande entrée, avec le prêtre. Mais, avant le 15e siècle en Orient, il le faisait seul. Dans le rite des Gaules restauré, il accomplit ces deux fonctions, seul, conformément à la Tradition.
Comme le dit très bien le Père S. Salaville dans son beau livre sur « Le rôle du diacre dans la liturgie orientale » (1962) : « le diacre facilite la participation active du peuple chrétien à la liturgie sacrée ».
Le diacre ne peut jamais bénir les personnes, ni bien sûr consacrer les Dons et donner l’absolution. Tout cela est spécifiquement sacerdotal. S’il est amené à présider un office dans lequel il y a une bénédiction des fidèles, il dit la formule face au peuple, mais ne le bénit pas.
Et il ne peut rien faire de lui-même : il doit toujours demander la bénédiction au prêtre, ou à l’évêque s’il dépend directement de lui.
Les qualités d’un diacre :
– la loyauté (il faut qu’il y ait une relation de confiance entre le prêtre et lui)
– l’obéissance
– l’attention (il doit avoir l’œil à tout)
– la transparence.
Le « titre »
Il est courant d’entendre dire « Père » ou « Père diacre » chez les Grecs, Russes ou Roumains. Mais c’est un abus de langage. « Père » est réservé au prêtre parce qu’il est la source des sacrements dans une paroisse donnée, en tant qu’envoyé de l’évêque : c’est lui qui consacre et délie. Lorsque le prêtre s’adresse au diacre dans la liturgie, il le nomme par sa fonction : « diacre » (pour la communion par exemple : « approche, diacre »).
Père Noël TANAZACQ
Recteur
(1ère éd. 1-2012 ; 2ème éd. 5-2015)