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La prière du cœur ou prière du Nom de Jésus
« Seigneur Jésus-Christ, Fils de Dieu / aie pitié de moi, pécheur »
ou
« Seigneur Jésus-Christ, Fis du Dieu vivant /aie pitié de moi, pécheur ».
C’est une prière simple, à caractère répétitif (comme un chapelet) qui peut être dite en toutes circonstances, soit à voix haute (ou à mi-voix) et consciemment (= en pensant bien à ce qu’on dit), soit mentalement et en s’en laissant imprégner. Le but des ascètes qui la pratiquent est de « prier sans cesse », comme l’enseigne le Christ (Lc 18/1) et de faire descendre l’intelligence dans le cœur, c’est à dire d’unifier la tête (l’intellect) et le cœur, qui est pour les orthodoxes le centre de l’être humain, le tabernacle intérieur où Dieu désire habiter. Ils s’efforcent d’unir la prière mentale au souffle, en pensant la 1ère parie de la prière dans l’inspiration et la 2ème partie dans l’expiration. Le « nom » est important parce qu’il est le signe de la personne et qu’il manifeste sa présence : le « Nom de Jésus » est porteur de la puissance du Christ : St Paul dit « qu’il est au-dessus de tout nom… et que tout genou fléchit devant Lui, dans le Ciel, sur la terre et sous la terre» (Phil.2/10). Faire que son cœur devienne le siège du Nom de Jésus, c’est ouvrir son cœur au Christ et le lui offrir. In fine, les grands ascètes avaient en vue de voir Dieu tel qu’Il est, c’est-à-dire d’être déifiés (comme St Séraphin de Sarov le sera de son vivant, au début du 19ème s.).
Cette forme de prière est un trésor spirituel de l’Orient. Elle puise ses racines dans le monachisme antique (les Pères du désert d’Egypte, de Syrie, de Palestine…) et n’a pas cessé d’être « perfectionnée » au fil des siècles, notamment vers l’an 1000 par St Syméon le nouveau Théologien, le chantre du Saint-Esprit, et au 14ème s. par St Grégoire Palamas, le grand théologien de la Lumière incréée et le défenseur des énergies divines incréées, face aux erreurs occidentales de la scolastique. C’est St Nicodème de l’Athos et St Macaire de Corinthe qui collationneront tous les écrits des Pères concernant cette voie spirituelle qu’on appellera l’hésychasme (recherche de la quiétude intérieure, de la paix, du silence des pensées…) à la fin du 18ème s. Ils l’appelleront la « Philocalie » (= amour de la beauté, c’est-à-dire de la beauté intérieure, la beauté divine). La prière du cœur, ou prière de Jésus, s’inscrit dans le grand mouvement de la spiritualité hésychaste.
Il peut être risqué de la pratiquer intensément, sans expérience spirituelle et sans guide : il faut l’aide et les conseils d’un père spirituel. Mais tout chrétien peut l’expérimenter et la pratiquer à son rythme, à condition de le faire sans forcer, tranquillement, d’une façon légère, détendue et adaptée à lui-même.
P. N.T.
(8 octobre 2013)